La Lettre n°83 de Janvier 2010

Actualités : Comment valoriser une entreprise qui a un mobilier d'exploitation important ?

Depuis une vingtaine d’années, certaines entreprises ont décidé de céder tout ou partie de leur immobilier d’exploitation, tout en continuant à l’occuper en tant que locataire, pour des motifs variés : se désendetter, accélérer leur développement grâce aux capitaux ainsi trouvés, verser un dividende exceptionnel, etc …, alors que d’autres l’ont conservé. Ainsi, le Printemps et non les Galeries Lafayette, UGC et non Pathé, Accor et non les hôtels Concorde, Tesco et Casino pour partie et non Auchan, Santander et non la Société Générale, etc …


Nous ne reviendrons pas dans cet article sur les raisons qui peuvent pousser tel ou tel groupe à faire le choix de l’externalisation de son immobilier d’exploitation (1).


Par contre, il nous paraît erroné d’évaluer de la même façon, avec les mêmes multiples ou les mêmes taux d’actualisation, un groupe qui possède son immobilier d’exploitation et un autre qui ne le possède pas.


Pour illustrer ce point, prenons l’exemple d’une entreprise qui fait 120 de résultat d’exploitation, valorisée sur la base d’un multiple du résultat d’exploitation de 10. D’où une valeur de l’actif économique de 1 200.


Cette société décide d’acheter son immobilier d’exploitation qui vaut 100 et sur lequel le rendement locatif de marché est de 8 %. L’actif économique de cette entreprise vaut maintenant 1 300 puisqu’il a été grossi d’un immobilier dont la valeur de marché est de 100. Il n’y a pas de raison, en effet, qu’il en soit autrement, l’immobilier d’exploitation pouvant être loué à un tiers ou possédé. Si cet immobilier est amorti sur une période de 50 ans, le résultat d’exploitation de l’entreprise va augmenter du montant du loyer désormais économisé et être réduit des dotations aux amortissements. D’où un nouveau niveau de 120 + 8 % × 100 – 100 / 50 = 126.


En toute rigueur, le multiple du résultat d’exploitation devrait s’établir dorénavant à 1 300 / 126 = 10,3. S’il restait à 10, l’actif économique vaudrait 10 × 126 = 1 260 et 40 de valeur auraient disparu. Que l’entreprise finance l’acquisition de son immobilier d’exploitation par endettement bancaire ou financier ou par augmentation de capital ne change rien à l’affaire et à la perte (dans cet exemple) de valeur due à une mauvaise approche de valorisation !


Ce n’est que dans le cas où le taux de rendement de l’immobilier moins le taux d’amortissement de ce même immobilier est égal à l’inverse du multiple du résultat d’exploitation que l’on éviterait cette perte de valeur, soit ici 16,7 (1 / (8 % - 2 %)). Or ceci est très peu probable et ne peut être que l’effet du hasard.


Quand l’inverse du multiple du résultat d’exploitation est supérieur à la différence entre le taux de rendement et le taux d’amortissement, l’immobilier est sous évalué. C’est le cas de notre exemple (1 / 10 est supérieur à 8 % - 2 %). Quand l’inverse du multiple du résultat d’exploitation est inférieur à la différence entre le taux de rendement et le taux d’amortissement, l’immobilier est surévalué.


En fait, on peut démontrer que le nouveau multiple du résultat d’exploitation pour un groupe qui achète (quel que soit le mode de financement) son immobilier d’exploitation est plus élevé si le multiple du résultat d’exploitation hors détention de l’immobilier est plus petit que l’inverse de la différence entre le taux de rendement et le taux d’amortissement de cet immobilier. C’est bien le cas de notre exemple : 10,3 est supérieur à 10 car 10 est plus petit que 1 / (8 % - 2 %) = 16,6.


Finalement tout ceci est assez logique car le nouveau multiple du résultat d’exploitation est la moyenne pondérée par les résultats d’exploitation, du multiple du résultat d’exploitation de l’activité industrielle ou commerciale et du multiple du résultat d’exploitation de l’immobilier commercial : 10,3 = 120/126 × 10 + 6/126× 16,7


De la même façon, le multiple du résultat d’un groupe ayant deux divisions distinctes est la moyenne pondérée des multiples du résultat d’exploitation de chacune de ces deux divisions, dès lors qu’il n’y a pas de frais de holding / conglomérat significatifs.


Si l’activité industrielle est en forte croissance justifiant un multiple du résultat d’exploitation élevé, l’acquisition de l’immobilier d’exploitation réduira en toute logique le niveau de ce multiple car l’immobilier génèrera des résultats en moindre croissance.


A l’inverse, si l’activité industrielle est fortement risquée et sans beaucoup de croissance au total, avec donc un multiple du résultat d’exploitation faible, l’acquisition de l’immobilier d’exploitation se traduira par une hausse du multiple.


Mais que l’on nous comprenne bien. Dans aucun de ces cas, la hausse ou la baisse du multiple du résultat d’exploitation n’est synonyme de création ou de destruction de valeur (2). C’est simplement le constat d’une modification plus ou moins importante du profil de risque et de croissance de l’actif économique de l’entreprise.
Au total pour évaluer par la méthode des multiples une entreprise qui ne possède pas son immobilier d’exploitation, l’évaluateur prendra soin de restreindre son échantillon aux entreprises comparables non seulement en taille, en activité mais aussi en politique immobilière. A défaut, il devra extourner dans le multiple des sociétés possédant leur immobilier l’impact de cette situation sur le multiple en utilisant la formule suivante :




De la même façon pour évaluer une entreprise qui possèderait son immobilier d’exploitation, il conviendrait de ne prendre dans l’échantillon que des entreprises ayant la même politique immobilière. A défaut, il faudrait corriger leurs multiples avec la formule précédente.


Le raisonnement est en fait le même que pour le PER : il ne peut être validement utilisé que si les structures financières sont les mêmes. A défaut, le raisonnement est biaisé.


Nous ne cachons pas cependant que cette approche rationnelle peut ne pas être mise en œuvre quand l’immobilier d’exploitation est finalement faible au regard de la valeur des autres actifs de l’entreprise. L’erreur faite n’est pas alors significative. Dans notre exemple, l’immobilier d’exploitation ne valait que 8 % (100 / 1200) de l’actif économique industriel et commercial de l’entreprise. Utiliser le même multiple de 10, avant et après l’acquisition de l’immobilier commercial conduirait à une sous évaluation de 40 sur 1 300, soit 3 %, largement dans la fourchette d’une évaluation, même bien conduite, et faible par rapport à l’incertitude sur un résultat d’exploitation futur.


Par contre, il existe dans les secteurs de l’hôtellerie, du cinéma, des grands magasins, de la distribution, de la banque, etc …, des cas où l’immobilier d’exploitation peut représenter une fraction importante de l’actif économique industriel, voire plus. Dès lors, cette approche est indispensable.


Mais certains analystes avaient déjà vu le sujet, et l’on trouve dans certaines notes d’analyse des valorisations par multiple d’EBITDAR (Earnings Before Interest Taxes, Depreciation, Amortization and Rent). Le multiple est alors calculé en rapportant une valeur d’entreprise modifiée à l’EBITDAR. La valeur d’entreprise modifiée est la valeur d’entreprise incrémentée des loyers capitalisés (3 ). L’idée est donc la même : raisonner pour toutes les entreprises comme si elles détenaient en propre leur immobilier (on a alors EBITDAR=EBITDA et valeur d’entreprise modifiée = valeur d’entreprise).


Quand est-il en matière de valorisation par actualisation des flux futurs ?


Dès lors, que l’immobilier d’exploitation est significatif et / ou que dans le secteur de l’entreprise les situations propriétaires ou locataires sont hétérogènes, il convient, à notre avis, de suivre une méthodologie ad hoc : la méthode Opco/Propco, Opco pour la société opérationnelle et Propco pour la société propriétaire.


Qu’est-ce que la méthode Opco/Propco ?


Dans la méthode Opco/Propco, on constate la réalité : l’entreprise possède son immobilier d’exploitation alors qu’elle pourrait le louer et on fait l’hypothèse que l’activité opérationnelle verse à la partie immobilière un loyer de marché calculé sur la valeur d’expertise de l’immobilier. La valeur des activités opérationnelles est alors calculée par actualisation des flux de trésorerie disponibles desquels est déduite cette charge locative. On ajoute alors la valeur de marché de l’immobilier pour obtenir la valeur totale de l’actif économique de l’entreprise.


De la même façon dans un DCF, on fait l’hypothèse que la totalité des flux de trésorerie disponible est distribuée aux actionnaires après que les créanciers aient récupéré leurs dus. Ces deux hypothèses sont à la fois, paradoxalement, centrales et indifférentes. Centrales tant pour le DCF que pour l’Opco/Propco parce que le calcul est ainsi fait. Indifférentes tant pour le DCF que pour l’Opco/Propco car peu importe que l’entreprise ait procédé ou non à la distribution de la totalité du flux de trésorerie ou qu’elle ait créée effectivement en son sein deux centres analytiques (l’opérationnel et l’immobilier) qui se facturent l’un l’autre.


Poursuivons le parallèle avec le DCF car il est révélateur. Il y a 20 ans quand le DCF a commencé à sortir des livres de finance pour s’imposer assez vite dans la pratique, nombreux étaient ceux qui prétendaient que c’était là une méthode pour valoriser une majorité car seul le majoritaire a le pouvoir de décider de l’affectation du free cash flow. Il y a longtemps que cette critique a disparu sinon la totalité des analystes ne l’utiliserait pas, pour évaluer les actions ! En effet, personne ne soupçonne spontanément les majoritaires de mal gérer systématiquement le free cash flow. Le free cash flow n’a pas besoin d’être distribué intégralement pour que la méthode du DCF soit pertinente. Il a simplement besoin d’être bien investi (4).


De la même façon, la méthode Opco/Propco ne nécessite absolument pas pour s’appliquer que l’entreprise procède à la séparation juridique ou même actionnariale entre l’exploitation et l’immobilier. Il suffit simplement que l’on s’assure régulièrement que le patrimoine immobilier ne pourrait pas être mieux valorisé que dans son exploitation actuelle, autrement dit que la partie opérationnelle puisse supporter ses loyers immobiliers théoriques. La pratique de marché est que ceux-ci ne dépassent pas 50 % de l’EBE avant loyers analytiques.


De la même façon que la méthode DCF n’a pas été une révolution, mais une évolution par rapport à l’actualisation des dividendes, la méthode Opco/Propco n’est pas non plus une révolution, c’est un progrès de la méthode d’actualisation des flux pour permettre de prendre en compte la composante immobilière plus ou moins forte des entreprises, comme le DCF permet de prendre en compte leur composante endettement.


Comme de très nombreux groupes ont recours à l’externalisation de leur immobilier, les méthodes Opco/Propco deviennent indispensables pour pouvoir évaluer correctement des entreprises avec des politiques immobilières de plus en plus différentes. Les méthodes Opco/Propco ne sont pas plus liées au boom de l’immobilier que la méthode DCF ne l’était au boom de l’endettement du début des années 1990, sinon les DCF auraient disparu depuis.
Il y a une quinzaine d’années, les multiples de l’EBE et du résultat d’exploitation ont supplanté le PER, et le DCF a supplanté l’actualisation des dividendes pour évaluer les entreprises industrielles et commerciales. De la même façon, la méthode Opco/Propco devrait s’imposer comme la méthode qui permet d’évaluer correctement dans l’absolu et les unes par rapport aux autres les entreprises disposant d’immobilier d’exploitation important.


D’un point de vue pratique, l’évaluateur prendra soin d’actualiser les flux de l’actif économique, loyers de l’immobilier déduits, à un taux d’actualisation plus élevé que celui observé pour une société qui possède son immobilier d’exploitation. En effet, les loyers constituent un coût fixe en trésorerie (il faut bien les payer dans la réalité ou comme hypothèse de calcul !) et élèvent donc le point mort.


On observe en effet dans la pratique que les entreprises ayant cédé leur immobilier d’exploitation ont un coût du capital plus élevé et un coefficient β plus élevé. Mais ceci ne veut pas dire pour autant qu’elles aient détruit de la valeur ; simplement elles ont un profil de risque un peu plus élevé. Elles n’auraient détruit de la valeur que si elles avaient cédé leur immobilier d’exploitation en dessous de sa valeur de marché.


* * *
Notons que notre approche illustrée pour les actifs immobiliers peut être dupliquée pour tous les actifs que la société peut prendre en location. Ainsi pour les entreprises disposant d’une flotte importante de véhicules, avions, navires, etc … le même type de problématique se pose et pourra être traité de la même façon, mutatis mutandis.
(1)Voir la Lettre Vernimmen.net n° 4 d’octobre 200
(2) Pour plus de détails, voir le chapitre 32 du Vernimmen 2010.
(3) Soit le loyer multiplié par un coefficient (7 ou 8x).
(4) Voir la Lettre Vernimmen.net n° 67 de juillet 2008.


Tableau : Les taux d'impôt en France en 2010

Les taux d’impôt en France pour 2010 pour des sociétés et personnes physiques françaises seront de :

(1) 15 % sur les premiers 38 120 € de bénéfice imposable ;
(2) 33,1/3 % sur la fraction d’IS inférieur ou égale à 763 000 € ;
(3° 19%, 15 % ou 1,66% sur la fraction d’IS inférieure ou égale à 763 000 € ;
(a) Sociétés dont le chiffre d’affaires hors taxes est inférieur à 7,630 M€ et dont le capital, entièrement libéré, doit être détenu pour au moins 75 % par des personnes physiques (ou des sociétés qui satisfont aux conditions).


(b) Sont exonérés sauf application d’une quote-part de frais et charges de 5%, les cessions de titres de participation détenus depuis au moins deux ans qui revêtent ce caractère au plan comptable ainsi que ceux considérés comme tels par la loi fiscale : (i) titres ouvrant droit au régime des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du CGI si inscription à une subdivision spéciale d’un compte de bilan correspondant à leur classification comptable (ii) actions acquises en exécution d’une OPA ou OPE par l’entreprise initiatrice.
 
Sont imposables au taux réduit de 15% (15,49% si contribution sociale de 3,3% applicable) les produits nets de concession de brevets, d’inventions brevetables ou de procédés de fabrication ainsi que les plus-values y afférentes (extension aux cessions de brevets, d’inventions brevetables ou procédés de fabrication applicables au titre des exercices ouverts à compter du 26 septembre 2007 et au titre des exercices clos à compter de cette même date). Sont aussi concernées les plus-values de cession de parts de FCPR et d’actions de SCR lorsque ces titres sont détenus depuis plus de 5 ans (avec, sous certaines conditions, application de l’exonération avec quote-part de frais et charges de 5%). 
En revanche, sont taxables au taux de droit commun, les cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées réalisées par une société relevant de l’IS (exception : taxation à 19% si cession des titres au profit de certaines sociétés immobilières telles que les SIIC ou de certains organismes publics (société d’économie mixte, HLM)).
Les cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière cotées ainsi que de titres de SIIC sont imposées à un taux spécifique de 19% (19,63% si contribution sociale de 3,3% applicable) dès lors qu’ils sont détenus depuis au moins 2 ans et considérés comme des titres de participation au plan comptable ou considérés comme tels au plan fiscal.
Les cessions de titres de sociétés établies dans un Etat ou territoire non coopératif ne relèvent plus du régime long terme (mesure applicable à compter du 1er janvier 2011).


(c) Participation au moins de 5 % en droits de vote et capital, titres détenus sous forme nominative, concerne aussi les titres dépourvus de droit de vote (actions de préférence) si la société mère détient globalement au titre de cette participation au moins 5% du capital et des droits de vote de la société émettrice. Sont exclues de ce régime les participations dans des sociétés non soumises à l’impôt sur les sociétés (notamment SIIC pour les dividendes prélevés sur des bénéfices exonérés, SICAV… De même, le régime mère-fille n’est pas applicable aux distributions réalisées par les sociétés établies dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI. Cette mesure s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011.


(d) Pour les titres ou parts de sociétés soumises à l’IS acquis à partir du 1er janvier 2006, la plus-value de cession à titre onéreux est diminuée d’un tiers par année de détention des titres au-delà de la 5ème année de leur détention (soit en pratique à partir de 2011) : exonération d’imposition sur le revenu pour les actions acquises à partir du 1er janvier 2006 et détenues pendant 8 ans, soit en pratique exonération totale pour les cessions intervenues à compter de 2014 (mais pas d’exonération des contributions sociales de 12,1%).


(e) Les plus-values des cessions effectuées à compter du 1er janvier 2010 seront soumises aux prélèvements sociaux au premier euro (abandon du seuil d’exonération de 25.730 euros). Les moins-values subies au cours d’une année seront imputables sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année et des 10 années suivantes, quel que soit le montant annuel des cessions de l’année considérée.


Recherche : Quelles réactions à la vente d'un actif ou d'une division

La réaction du marché à une acquisition d’entreprise est généralement positive pour la cible, mais négative pour l’acquéreur lorsqu’elle est payée en actions (1). La recherche en finance a permis de vérifier ce phénomène sur de larges échantillons (2), et de l’expliquer par les asymétries d’information.


L’acquéreur dispose d’une information privée sur la valeur réelle de ses propres titres ; il choisit de payer en actions lorsqu’il estime que son entreprise est surévaluée par les marchés. En faisant ce choix, il envoie un signal négatif au marché. Inversement, le fait de choisir de payer en numéraire plutôt qu’en actions est un signal positif, et l’opération entraîne dans ce cas une hausse de la valeur boursière de l’acquéreur.
Des chercheurs d’HEC Paris ont étudié la réaction du marché dans le cas d’une acquisition d’un actif ou d’une branche de l’entreprise (3). Ils proposent un modèle théorique selon lequel le moyen de paiement choisi envoie au marché un signal inverse du cas d’une acquisition totale. L’idée générale est la suivante :


• pour une acquisition de l’entreprise dans sa totalité, l’acquéreur potentiel doit faire une offre formelle sur laquelle les actionnaires de la cible devront se prononcer par un vote. C’est donc l’acquéreur qui choisit de faire une offre en cash ou en actions, et la cible se prononce pour ou contre (il s’agit d’une offre à prendre ou à laisser) ;
• dans le cas d’une acquisition d’un actif de l’entreprise, le vote des actionnaires n’est pas requis. La procédure est organisée par le vendeur : il met en compétition les acquéreurs potentiels par un système d’enchères. La meilleure offre est retenue, mais le choix du mode de paiement revient in fine au vendeur : c’est lui qui décide de retenir une offre en cash ou en actions, ou même de solliciter une offre en actions de la part du meilleur acquéreur potentiel.


Selon cette étude, le fait que le choix du mode de paiement soit du ressort du vendeur renverse le signal envoyé au marché sur la valeur de l’acquéreur. Un paiement en actions signifie que le vendeur croit à la valeur de l’actif qu’il vend et à la qualité de l’opération pour l’acquéreur : il préfère donc être payé en actions de l’acquéreur pour bénéficier d’un retour sur investissement positif. Inversement, le signal est négatif si le vendeur préfère obtenir du cash.


Les auteurs ont vérifié empiriquement les prédictions de leur modèle, à partir d’un échantillon d’acquisitions partielles aux Etats-Unis entre 1989 et 2002. Leurs résultats sont en ligne avec leurs prédictions : le titre de l’acquéreur présente une surperformance moyenne de 3,44% au moment de l’annonce de l’opération lorsque celle-ci est effectuée en actions. Par rapport à la taille de l’opération d’acquisition, cela représente un retour sur investissement moyen de 20,15%.


Dans le cas d’une opération en cash, l’impact n’est pas significativement différent de zéro (sous-performance de 0,03%). Sans surprise, le vendeur bénéficie toujours de l’opération, comme c’est le cas dans les opérations d’acquisition totale.


Enfin, les auteurs vérifient que la performance opérationnelle de l’acquéreur se trouve améliorée après une acquisition d’actifs payée en actions, alors qu’elle n’est pas modifiée après une acquisition payée en cash : le vendeur choisit donc judicieusement le mode de paiement.
(1) Voir la Lettre Vernimmen.net n° 24 de décembre 2003.
(2) Par exemple, N.TRAVLOS (1987), Corporate takeover bids, methods of payment, and bidding firms’s stock returns, Journal of Finance, n°42, p.943-963.
(3) U.HEGE, S.LOVO, M.B.SLOVIN et M.E.SUSHKA (2009), Equity and cash in intercorporate asset sales : theory and evidence, Review of Financial Studies, vol.22, n°2, p.682-714. Voir aussi M.E.SUSHKA et U.HEGE (2009), Equity or cash ? The signal sent by the way you pay, Harvard Business Review, May 2009.


Q&R : Comment calculer la rentabilité économique d'une société dont l'actif économique est négatif

Les sociétés dont l’actif économique est négatif sont caractérisées par un besoin en fonds de roulement très fortement négatif couvrant l’ensemble des immobilisations nettes. Relevant de secteurs particuliers (restauration collective, distribution, etc.), elles dégagent une rentabilité sur capitaux propres très élevée.


La double fonction des capitaux propres — assurer le financement des investissements et servir de garantie aux créanciers — se trouve donc amputée du premier aspect : dans ce type d’entreprise, seule la seconde fonction demeure.


La rentabilité économique doit être, dès lors, calculée compte tenu du produit des placements financiers (intégré au résultat) et du volume de ces placements (intégré à l’actif économique) :


Rentabilité économique = [(Résultat d’exploitation + produits financiers) / (Actif économique + Placement)] x (1-IS)


Au demeurant, ces entreprises tiennent compte de leurs produits financiers dans la détermination des prix de vente de leurs articles ou de leurs prestations de services. Par conséquent, il est illusoire de calculer un actif économique n’intégrant pas les placements financiers ; la morale financière est sauve…


*********** La rémunération des financiers d’entreprise ***********


Ceux de nos lecteurs intéressés pourront trouver sur la page http://www.michaelpage.fr/productsApp/newtech/EDR_MP-finance.pdf, l’étude annuelle de Michaël Page et de l’Association Nationale des Directeurs Financiers et de Contrôle de Gestion sur la rémunération des cadres et dirigeants des fonctions financières et de gestion.


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