La Lettre n°117 de Septembre 2013

Actualités : Le Vernimmen 2014 vient de paraître

Votre nouveau Vernimmen s’ouvre par un texte de mise en perspective de l’actualité économique et financière des 12 derniers mois et de réflexions sur les 12 prochains mois.

 

Cette nouvelle édition 2014 s'est enrichie d'un nouveau chapitre consacré à la création de l’entreprise et au financement des start-up. Pouvions-nous continuer d’ambitionner d’être un ouvrage de référence sans présenter les aspects financiers de la naissance d’une entreprise ?  Il couvre les particularités de l’entreprise qui se crée, les principes de base de son financement, la typologie des investisseurs dans les jeunes entreprises et leurs relations avec les entrepreneurs, la gestion financière d’une start-up et son évaluation. Le résumé de ce nouveau chapitre est disponible en cliquant ici.

 

En outre, des développements nouveaux ont été écrits concernant en particulier le taux d’argent sans risque et le rôle du directeur financier.

 

Naturellement, nous avons fait notre travail habituel de mise à jour pour vous offrir un outil de travail au quotidien aussi précis, fiable et exhaustif et pertinent que possible, intégrant :

• les nouvelles dispositions comptables, boursières, juridiques et fiscales (comme la nouvelle imposition des plus-values ou la limitation de la déductibilité des intérêts) ;

•  l’ensemble des statistiques et graphiques actualisés présentant les données les plus récentes à juin 2013 (plus de 100 tableaux et graphiques) ;

•  les derniers travaux de recherche ayant des applications pratiques (comme les conséquences du caractère des dirigeants sur le niveau d’endettement).

 

C’est ainsi que cette année entrent dans le Vernimmen les terme EuroPP, crowdfunding, bons de souscription de parts de créateur d’entreprise, Initial Bond Offering, incubateur, love money, Banque Publique d’Investissement, corporate venture, clauses de ratchet et de pay-to-play, etc.

 

Comme tout classique, le Vernimmen vous offre des socles de savoir forgés par la pratique et enrichis par des réflexions conceptuelles, lesquelles ne vous laissent jamais désarmés face à un problème ou une situation financière :

• le plan  type d'une analyse  financière et d’une analyse boursière ;

• les outils de mesure de la création de valeur ;

• les techniques de placements des actions, des obligations, des  crédits syndiqués ;

• etc.

 

Pour vous aider à mieux utiliser «votre Vernimmen», chaque chapitre se clôt par un résumé, des exercices (174 en tout) et des questions (771) corrigés.

 

Nous avons utilisé le rabat de couverture pour présenter dans un lexique français-anglais-américain les principaux termes de la finance, ainsi qu'une antisèche («Le Vernimmen» résumé en une page !).

 

Tant en annexe que dans le corps du texte, de très nombreux graphiques et tableaux vous donnent des éléments de référence et de comparaison. Afin de vous aider à aller au-delà, si besoin, chaque chapitre est doté d'une bibliographie avec des conseils d'orientation vers des papiers de recherche fondamentale ou des articles de presse ou des livres. Enfin, l'index comprend plus de 1 700 entrées.

 

Voici ce que certains de ses utilisateurs ont écrit sur le Vernimmen 2014 :

 

"Construire un diagnostic économique complet est souvent beaucoup plus complexe que ce que laisse penser la première impression. Et il comporte souvent des enjeux majeurs de création de valeur pour l'entreprise.

 

Cela nécessite une solide maîtrise de la traduction de tous ces enjeux sur le plan comptable, fiscal, de la génération de cash et de la création de valeur. Malgré 25 années d'expérience et afin de m'assurer que le raisonnement est précis et complet, le Vernimmen reste une référence sur laquelle je m'appuie.

 

Et puis même si le quotidien professionnel est passionnant, fait de management et de prise de décisions, intellectuellement cela fait du bien de temps en temps de revenir aux sources et à la technique. De là à faire du Vernimmen un livre de chevet....il n'y a qu'un pas !"   

Antoine Burel, directeur financier du groupe Legrand

 

"J'utilise depuis toujours l'édition papier du Vernimmen comme un outil de référence clair et complet. J'y vois une grande fidélité au talent pédagogique exceptionnel de son fondateur. Le site est très bien conçu, toujours actualisé et également fort utile pour expliquer simplement et intelligemment à des collaborateurs non-financiers les concepts financiers. "

Laurence Debroux, directrice générale administration et finance, JC Decaux

 

« Le Vernimmen m'a permis d'apprendre et de comprendre la finance. Je conseille cet ouvrage à tout étudiant ou professionnel du monde de la finance, pour sa clarté, son efficacité. J'exhorte surtout les étudiants Africains à s'approprier cet ouvrage unique dans son domaine. »

Abdul Mohamed Diarassouba, Etudiant au CESAG Dakar

 

«On comprend très vite que le Vernimmen nous sera indispensable!»

Hugo Granat, analyste chez Barclays Capital

 

« La nouvelle édition du Vernimmen permet maintenant d’appréhender la manière dont se déroulent les premiers tours de financement d’une start-up. Il fallait bien ça pour s’y retrouver ! Et bien comprendre les différentes options permettra à l’entrepreneur avisé de choisir les solutions les plus simples possibles, qui permettent d’aligner les intérêts de chacun, dans le temps, sans créer de frustrations inutiles ni d’usines à gaz ! »

Pierre Kosciusko-Morizet, PDG fondateur de PriceMinister et cofondateur d’Isai

 

« Le Vernimmen est un formidable outil pédagogique d'une limpidité impressionnante."

Léo Placzek, étudiant à Rouen Business School

 

« L’ouvrage de Pierre Vernimmen a le grand mérite d’offrir une vision pratique de la théorie financière, ou, si l’on préfère, une interprétation structurée et rationnelle des réalités financières. Ce mariage de la théorie et de la pratique se conjugue avec un sens de la pédagogie (et de l’humour) qui rend l’ouvrage incontournable pour tout étudiant en finance. »

Philippe Raimbourg, professeur à l’université Panthéon-Sorbonne et à ESCP Europe

 

Tant la version en ligne que la version iPad du Vernimmen vous offrent en plus :

  • les podcasts de nos cours à HEC Paris (nous en avons doublé le volume cette année avec des cours sur le LBO, les fusions-acquisitions, l’augmentation de capital, la structuration de la dette, etc.) 

  • la totalité (pour la version en ligne) ou la quasi-totalité (pour la version iPad) des archives de la Lettre Vernimmen.net depuis son premier numéro de juin 2001 (soit 1 000 pages environ),

  • un glossaire de plus de 2 300 termes de la finance. Pour la version en ligne, nous réalisons à mi année une actualisation des statistiques et des tableaux et incluons les changements majeurs des réglementations comptables, fiscales, juridiques et boursières,

  • le chapitre consacré à l’histoire de l’analyse financière, sorti de l’édition papier pour laisser la place à celui sur le financement des start-up.

 

Naturellement les abonnés à la version électronique en ligne du Vernimmen (www.vernimmenenligne.fr) disposent de la nouvelle édition 2014 depuis début août. Si vous souhaitez les rejoindre, cliquez ici.

 

Si vous disposez d’un iPad et souhaitez y intégrer le Vernimmen 2014 enrichi, cliquez ici.

 

Pour vous procurer l’édition papier du Vernimmen 2014, cliquez ici. Ses propriétaires bénéficient de conditions tarifaires réduites pour s’abonner aussi à la version en ligne.

 

Nous vous souhaitons autant de plaisir à utiliser votre nouveau Vernimmen 2014 que nous en avons eu durant ces 700 heures nécessaires pour le créer !



Actualités : Comptabilisation des locations et leasings : Errare humanum est sed perseverare diabolicum !

On se rappelle que l’IASB et le FASB avaient le projet commun de modifier en profondeur la comptabilisation des contrats de locations sous le prétexte d’améliorer l’information financière à la disposition des investisseurs. Pour notre part, nous pensions qu’il s’agissait d’un grand bond… en arrière de 30 ans ! [1]

En un mot, il s’agissait de comptabiliser les locations opérationnelles comme les locations financières en créant à l’actif du bilan un droit à location par actualisation des loyers futurs dont la contrepartie, au passif du bilan, serait une dette de nature financière.

Après consultation publique qui n’avait pas démontré un grand enthousiasme pour ce projet, c’est un euphémisme ..., le projet avait été remis à l’étude. Il en est ressorti en mai dernier dans une version amodiée pour une consultation publique qui s’achève mi-septembre. Autant dire tout de suite que les différences de ce nouveau projet par rapport à la mouture initiale, en ce  qui concerne les entreprises, se situent au niveau des détails et non malheureusement du fond qui nous paraît tout aussi mauvais.

 

Il existe dans la vie des affaires deux types principaux de locations :

• les contrats de location, par lesquels un propriétaire met à la disposition d’un locataire un bien pendant une durée définie moyennant le paiement d’un loyer avec un retour du bien à l’échéance du contrat de location, à moins que celui-ci soit prorogé ; et

• les contrats de crédit-bail ou leasing par lesquels une entreprise se voit mettre à disposition un bien pendant une durée proche de sa durée de vie, avec le plus souvent une option d’achat finale du bien à un prix plus faible que la valeur résiduelle du bien à cette échéance. Un loyer régulier est payé dont une partie correspond conceptuellement à la rémunération de la mise à disposition du bien et une autre au paiement anticipé d’une partie de son prix.

Ces deux types différents de contrat de location sont traduits comptablement par deux traitements distincts qui correspondent à la nature économique différente de ces opérations.

Le contrat de location (simple ou opérationnelle pour le distinguer du crédit-bail aussi appelé leasing ou location financière) donne lieu à des loyers qui sont comptabilisés au compte de résultat en charges d’exploitation. Rien n’est comptabilisé au bilan.

Le contrat de location financière donne lieu, lui, à l’inscription du bien à l’actif du bilan du preneur avec corrélativement inscription au passif d’une dette de nature financière correspondant à la valeur actuelle des loyers restant à payer. Au compte de résultat, le loyer payé disparaît et fait place à des frais financiers et à la dotation aux amortissements du bien. Tout se passe comme si le preneur avait acquis le bien et s’était endetté pour ce faire. Ce traitement n’a rien de choquant et correspond, au contraire, à l’intention de l’entreprise qui entre dans un contrat de location financière : utiliser le bien comme si elle en était le propriétaire effectif car elle sait bien que, in fine, elle en deviendra propriétaire, tout en le finançant par un endettement ad-hoc dans l’intervalle. Pour elle, un crédit-bail est avant tout un crédit. 

 

Un grand bond en avant a été fait il y a une vingtaine d’années lorsque la comptabilité a fait sienne l’interprétation économique des contrats de crédit-bail au détriment de l’interprétation juridique (juridiquement, le preneur n’est pas propriétaire du bien). Dès lors, les utilisateurs des comptes n’ont plus eut besoin de procéder à des retraitements extra comptables en inscrivant à l’actif le bien et une dette de nature financière pour le même montant, ni de retraiter les loyers de crédit-bail en frais financiers et en dotation aux amortissements. Bref, un grand progrès.

 

De nouveau l’IASB et le FASB veulent caler le traitement des locations simples sur celles des locations financières. La valeur du droit d’utilisation du bien en location simple serait inscrite à l’actif. Parallèlement, une dette de nature financière apparaîtrait au passif qui se réduirait progressivement. Le loyer disparaîtrait au profit de frais financiers et de dotations aux amortissements, ces dernières venant réduire chaque année la valeur du droit d’utilisation [2].

La valeur de ce droit d’utilisation devrait être révisée si un changement des conditions économiques et financières affectait négativement sa valeur, donnant lieu à une dépréciation dans le compte de résultat.

Par rapport au projet initial celui-ci introduit une nouvelle disposition en classifiant les contrats de location en  deux types : A et B dont la principale conséquence comptable est un montant et un mode différents de comptabilisation des loyers au compte de résultat.

Le type A regrouperait les contrats de location financière ou opérationnelle pour lesquels la durée de location correspondrait à la majeure partie de la durée de vie économique du bien loué ou pour lesquels la valeur actualisée des loyer serait égale à la quasi totalité de la juste valeur de l’actif ; autrement dit des contrats « longs » par rapport à la durée de vie résiduelle du bien loué.

Le type B regrouperait les contrats de location financière ou opérationnelle pour lesquels la durée de location correspondrait à une partie insignifiante de la durée de vie économique du bien loué ou pour lesquels la valeur actualisée des loyers serait égale à un montant insignifiant de la juste valeur de l’actif ; autrement dit des contrats « courts » par rapport à la durée de vie résiduelle du bien loué.

Pour les contrats de type A (portant principalement sur des locations longues d’actifs immobiliers ou non), la charge de loyer constatée au compte de résultat serait différente de celle constatée en trésorerie et effectivement payée. Mais sur la totalité de la durée du contrat, la totalité des charges constatées correspondrait à la somme des loyers effectivement payés. En effet, le projet prévoit que la valeur actuelle des loyers à payer sur la durée du contrat, actualisés au taux du contrat (pour un contrat de location financière) ou au coût de l’endettement marginal de l’entreprise (pour une location simple), soit amortie linéairement sur la durée de vie du contrat. A cette charge d’amortissement constante chaque année se rajouterait la charge d’intérêt calculée comme le produit du taux d’intérêt vu plus haut par la valeur actuelle des loyers résiduels. La charge totale, somme d’un amortissement constant et de frais financiers décroissants, serait donc décroissante. Les deux charges apparaitraient séparément l’une en charge d’exploitation, l’autre en charge financière au compte de résultat.

Pour les contrats de type B (portant principalement sur des locations courtes d’actifs immobiliers ou non), la charge de loyer au compte de résultat serait constante chaque année (et correspondant aux loyers effectivement payés aux mécanismes éventuels d’indexation près). Elle résulterait implicitement de la somme d’une charge financière décroissante correspondant comme précédemment au produit du taux d’intérêt par la valeur actuelle des loyers résiduels et d’une dotation aux amortissements complémentaire croissante. Mais il n’y aurait pas de ventilation au compte de résultat entre les deux composantes et seule une charge d’exploitation les totalisant apparaitrait.

Dans les tableaux de flux, les contrats de type B ferait apparaître comme aujourd’hui un loyer en flux d’exploitation. Ceux de type A feraient apparaître le remboursement du principal en flux de financement et les intérêts en flux de financement ou en flux d’exploitation.

Autrement dit, pour les contrats de type B, il n’y a rien de nouveau sous le soleil au compte de résultat et au tableau de flux. Ce n’est qu’au bilan que la révolution a lieu avec la comptabilisation d’un droit d’utilisation et « un passif de loyer » (c’est-à-dire sa dette) en contrepartie.

Les contrats de type A sont de fait traités, au bilan comme au compte de résultat, comme le sont aujourd’hui les locations financières. En ce point, la différence entre locations de type A et de type B vient remplacer la distinction entre location simple et location financière.

 

Les normalisateurs comptables fondent leurs points de vue sur les postulats suivants :

• une location financière et une location simple sont fondamentalement le même acte économique et il n’est pas normal qu’ils soient traduits différemment dans les comptes ;

• il est difficile de distinguer nettement par des principes, et non par des règles, location simple et location financière et c’est laisser trop de marges de manœuvre aux dirigeants que de les laisser faire ce choix qui affecte la comparabilité des comptes d‘une entreprise à l’autre ;

• des investisseurs faisant des redressements des contrats de location simple pour les analyser en locations financières, autant les faire pour eux.

 

Que l’on nous permette d’être en désaccord net avec ces positions.

L’esprit de la location simple n’a rien à voir avec l’esprit d’une location financière. Une entreprise recourt à une location simple parce que :

• elle n’a pas les moyens financiers, aujourd’hui ou plus tard, d’acheter le bien ;

• elle veut se garder la flexibilité de pouvoir rendre le bien à l’issue du contrat pour en louer un autre qui corresponde mieux à ses besoins du moment, voire en acheter un ;

• elle préfère consacrer ses ressources financières, le plus souvent en montant limité, à d’autres affectations qu’elle juge plus efficaces pour elle : dépenses de R&D, croissance externe, investissements marketing, etc.

Une entreprise recourt à un crédit-bail parce qu’elle veut disposer du bien comme si elle en était déjà propriétaire, et in fine, l’acquérir. Mais elle ne peut pas ou ne veut pas aujourd’hui l’acquérir sans recourir à un crédit. Comme le prêteur garde juridiquement la propriété du bien en crédit-bail jusqu’à l’échéance du contrat, il s’agit d’une forme de crédit particulièrement bien garanti pour le prêteur ; et donc à des conditions de taux d’intérêt intéressantes pour l’emprunteur.

La logique économique et financière est donc totalement différente entre location simple et location financière. Il est dommage que l’IASB ne veuille pas le voir et s’obstine dans une voie qui conduit à rendre plus complexe la lecture des comptes, à alourdir inutilement la charge de travail de ceux qui les préparent et contrairement à ce qui est affirmé sans la moindre démonstration, aboutir à compliquer la vie de ceux qui utilisent au quotidien les comptes.

Plus grave en complexifiant la comptabilité, l’IASB et le FASB la rendent plus opaque et donc moins crédible pour le commun des mortels alors que sa simplicité est un gage de son acceptabilité.

Il est vrai que dans certains secteurs, comme la grande distribution, l’hôtellerie et le transport aérien, des entreprises ont massivement eu recours à la location, souvent d’ailleurs en cédant des actifs en pleine propriété pour les relouer, en location simple, auprès de leurs nouveaux propriétaires. Il est vrai aussi que des agences de notation, des banques redressent les comptes des compagnies aériennes ou de groupes hôteliers pour tenir compte d’engagement de paiement de loyers qui peuvent obérer lourdement les flux de trésorerie disponibles. Ainsi Standard & Poors capitalise-t-il les loyers fixes d’Accor, mais ne redresse pas les loyers indexés sur le chiffre d’affaires.

Quel est le poids de ces secteurs dans l’ensemble de l’économie ? Une dizaine de pourcents tout au plus. Ne suffit-il pas de demander que ces informations figurent en annexe, quand les montants sont significatifs, pour permettre à ceux qui le souhaitent, une petite minorité des investisseurs, et non la majorité comme le prétend l’IASB sans en donner la moindre démonstration, de procéder aux retraitements qu’ils souhaitent ?

Quant à dire qu’il est difficile de faire la distinction entre location simple et location financière, on se moque du monde. A quoi sert l’IAS 17 ? Quid de la distinction entre location de type A et de type B que ce projet introduit ? Si ce nouveau projet a au moins un intérêt, c’est de proposer une clé de répartition qui nous paraît précise entre locations opérationnelles et locations financières et qui pourrait remplacer l’actuelle, plus conceptuelle, comprise dans IAS 17.

Et si l’on suit la logique de l’IASB et du FASB, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Pourquoi ne pas inscrire au bilan un droit d’utilisation des salariés (car nous devons tous à nos employeurs une période de préavis) avec une dette en contrepartie (les salaires dus pendant cette période de préavis). Idem pour un contrat avec un fournisseur prévoyant un volume d’achat de biens et de services sur plusieurs périodes. Comme en toute chose, il faut mettre une limite qui délimite clairement ce qui relève d’un financement et ce qui relève de la flexibilité (la location simple). A notre avis, cette limite passe là où elle est actuellement, et non là où l’IASB et le FASB ont l’intention de la mettre.

Nous ne saurions donc trop encourager nos lecteurs à faire valoir leurs points de vue auprès d’Acteo (www.acteo.org) qui prépare une réponse française à ce projet, ou directement à l’IASB (www.ifrs.org).

Espérons que le bon sens prévaudra, qu’IAS 17 sera simplement précisée quant à la distinction entre locations financières et locations opérationnelles et que leurs comptabilisations actuelles resteront en place car ni l’IASB, ni le FASB n’ont démontré que leur projet commun apportait une amélioration par rapport à la situation actuelle. Nous sommes convaincus de l’inverse.


 

 

[1] Voir la Lettre Vernimmen.net n° 91 d’octobre 2010

[2] Voir, pour les détails du traitement, le chapitre 8 du Vernimmen 2014

 



Tableau : Les taux d'impôt sur les sociétés dans le monde

Le taux moyen d’impôt sur les sociétés dans les pays de l’OCDE s’est établi en 2013 à 25,32 % en baisse continue depuis 1993 (38 %) ! Mais les pays de l’ex-bloc soviétique ont fait baisser la moyenne d’autant que le périmètre de l’étude de KPMG s’est élargi à de nombreux petits pays qui ont plutôt des faibles taux d’impôt pour attirer les investissements). Cela dit, de plus en plus de grands pays européens ont des taux d’impôt aux alentours de 20% : Suisse, Suède qui vient de baisser de 26,3% à 22%, Royaume-Uni à 23% et avec un objectif de 20% en 2015 (contre 30% en 2008), la Pologne  est un peu en dessous (19%).

L’écart entre la France et le Royaume-Uni est maintenant pour les groupes de 13,1 points. Autrement dit le même bénéfice avant impôt se traduit par un résultat après impôt de 20,5 % supérieur outre Manche à ce qu’il est ici, et donc par un autofinancement supérieur. Et comme on croit comprendre que le projet du gouvernement de réduire le taux de l’imposition sur les sociétés français à 30% sera au mieux à coût budgétaire nul, de nouvelles taxes étant créés pour compenser, cet écart n’est pas prêt de se réduire, malheureusement pour la compétitivité des entreprises françaises.

Comme Henri Lagarde l’a très bien montré [1] ces taux ne sont que des taux faciaux qui cachent des modalités d’application qui, en France, ont tendance à alourdir le taux effectif.

 


Taux faciaux d’impôt sur les sociétés dans les pays de l’Union Européenne, de l’OCDE et dans le Monde (Source KPMG)

 

[1] Voir La Lettre Vernimmen.net  n°110 d’octobre 2012



Recherche : Levier financier : le cas des augmentations proactives du niveau d'endettement

avec la collaboration de Simon Gueguen - Enseignant-chercheur à Paris Dauphine

Nous traitons régulièrement dans ces colonnes des théories de la structure du capital et de la question du niveau d’endettement optimal. L’existence de modèles théoriques différents et souvent contradictoires offre un espace propice aux études empiriques, celles-ci venant soutenir ou infirmer les différents modèles.

L’article que nous présentons ce mois-ci relève de cette littérature mais propose une approche différente. Son objet n’est pas de tester la capacité de différents paramètres à expliquer le niveau d’endettement, mais d’étudier une situation précise : le cas des augmentations proactives du niveau d’endettement. Il s’agit d’augmentations soudaines de la dette résultant en une hausse du levier financier au-delà du niveau attendu compte tenu des caractéristiques de l’entreprise. Elles sont dites « proactives » car il ne s’agit pas de simples décisions techniques consistant à retrouver un levier financier cible, par exemple suite à une hausse du cours de bourse. Les auteurs ont constitué un échantillon de 2 314 événements de ce type, sur des entreprises américaines entre 1971 et 1999. Ils ont ensuite étudié les motivations de ces augmentations proactives du niveau d’endettement, ainsi que l’évolution ultérieure du levier financier.

Pour sélectionner leur échantillon et effectuer des tests empiriques, les auteurs ont d’abord mesuré pour chaque entreprise et chaque année un levier financier cible compte-tenu de différents facteurs (ratio market-to-book, tangibilité des actifs, profitabilité, taille, niveau médian sectoriel du levier financier). Ils n’ont retenu dans leur échantillon que les augmentations de dette résultant en un levier financier supérieur d’au moins 0,10 au niveau cible. Avant l’augmentation de la dette, le levier financier médian de leur échantillon est très proche du niveau cible à 0,30. L’augmentation proactive de la dette conduit à un niveau de 0,55 ; ce sont donc des augmentations brutales très significatives de l’endettement qui sont étudiées.

L’analyse montre que dans une très large majorité des cas (67%), les fonds levés sont utilisés pour des investissements à long terme. Pour le reste, dans 23% des cas, il s’agit de financer des augmentations du besoin en fonds de roulement. La distribution aux actionnaires des fonds levés ne concerne que 3% des cas. Ces augmentations proactives ont donc pour but de financer l’actif des entreprises et non de restructurer leur passif. Les auteurs montrent également que, dans 90% des cas, les entreprises n’auraient pas été capables de poursuivre leurs politiques opérationnelles sans les fonds obtenus par ces augmentations de dette.

Une autre partie de l’étude concerne l’évolution du levier financier dans les sept années qui suivent l’augmentation initiale. Si ce levier a tendance à diminuer, la moitié de la hausse initiale reste présente après sept ans. Surtout, les entreprises diminuent le levier à mesure qu’elles génèrent du cash ; celles qui ont des difficultés à générer du cash ont tendance à s’endetter encore davantage, ce qui est contraire aux théories de l’endettement cible.

En sélectionnant volontairement des comportements atypiques, l’article pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Il montre que dans de nombreux cas le comportement des entreprises en matière de financement n’est pas en cohérence avec les principales théories. Il reste beaucoup à trouver sur ce thème, nul doute que nous y reviendrons bientôt dans cette chronique !



Q&R : Pourquoi les fonds d'investissement utilisent-ils plus volontiers le TRI et le multiple de l'investissement initial que la VAN ?

Notre lecteur peut être surpris de constater que des investisseurs à priori très sophistiqués, les fonds d’investissements et en particulier ceux de LBO, utilisent comme critères de choix d’investissement le taux de rentabilité interne ou le multiple de la mise initiale plutôt que la valeur actuelle nette, dont les chercheurs ont démontré qu’elle leur était supérieure en efficacité et en pertinence.

On reproche principalement au TRI de conduire à maximiser un taux de rentabilité plutôt que la valeur des fonds investis, de supposer que les flux intermédiaires dégagés par l’investissement sont réinvestis au taux du TRI plutôt qu’au coût du capital du projet, et parfois de conduire à une impasse mathématique quand il n’y a pas de TRI ou quand il y en a plusieurs [1].

Eliminons d’abord ces deux derniers cas de figure qui supposent pour survenir plus d’un changement de signe dans la chronique des flux, ce qui n’est pas le cas des LBO où il y a simplement le plus souvent pour l’investisseur en capitaux propres un flux initial et un flux final au moment du désinvestissement.

Dans la mesure où les flux de trésorerie intermédiaires perçus au niveau du fonds de LBO sont immédiatement reversés aux investisseurs, le problème du taux de rentabilité auquel ces flux sont réinvestis au sein du fonds ne se pose pas.

Enfin confondre maximisation d’un taux de rentabilité et maximisation de la valeur ne se rencontre qu’en matière de choix d’investissements mutuellement exclusifs l’un de l’autre (ainsi construire une usine produisant 100.000 tonnes ou une autre de 125.000 tonnes) ou quand les investissements sont contraints par un financement limité qui ne permet pas de réaliser tous les investissements créateurs de valeur. On ne voit pas très bien comment le premier cas peut s’appliquer à un fonds d’investissement. Et dans le second, le risque est faible car un fonds qui réussit lève un nouveau fonds avant même d’avoir épuisé la capacité d’investissement du précédent.

Oui les fonds d’investissement ne respectent pas l’orthodoxie financière, mais dans leur cas ceci ne porte pas à conséquence car ils sont justement dans la situation où les défauts du TRI ne trouvent pas à s’appliquer.

Des raisons plus pratiques font que l’utilisation intensive des TRI ou des multiples de l’investissement initial ne fait pas pour autant des fonds d’investissement des apostats !

Communiquer sur une valeur actuelle nette de 100 d’un investissement n’a pas beaucoup de sens pour des investisseurs dont certains auront investi 2, d’autres 4 ou 10, voire 15. C’est beaucoup plus parlant de communiquer sur un multiple de 3 fois l’investissement initial ou sur un taux de rentabilité interne de 20 %. Chaque investisseur y trouvera son compte puisque tous ont investi des montants différents.

Enfin pour un industriel, un investissement est souvent un équipement qui dégage des flux chaque année et est gardé pour l’essentiel de sa durée de vie. Pour un fonds d’investissement, un investissement est une entreprise qui ne lui verse le plus souvent aucun flux intermédiaire et est gardée pour quelques années. Pour un industriel, le multiple de l’investissement initial n’a aucun sens puisque l’investissement est progressivement consommé et perd sa valeur, il n’ a pas vocation à être céder ; pour le fonds d’investissement, il a tout son sens puisque dès l’investissement, on sait que l’issue est la revente dans quelques années. Et quelle meilleure façon de marquer le succès sinon de chiffrer la culbute faite ?

 

[1] Pour plus de détails sur ces points, voir le chapitre 20 du Vernimmen 2014

 



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