La Lettre n°90 de Septembre 2010

Actualités : Le nouveau Vernimmen est disponible

Votre Vernimmen, dans son édition 2011, s'ouvre, comme nous en avons pris l'habitude depuis 3 ans, par un texte de mise en perspective de l'actualité économique et financière des 12 derniers mois. Nous l'avons intitulé : Le Monde change. Nous avons en effet la conviction que nous sommes en train de vivre un mouvement de nature braudelienne. Nous vous laissons le soin de le découvrir dans le texte.

Comme nous savons que beaucoup d'entre vous ont dépensé une bonne partie de leur énergie ces derniers mois à gérer au mieux le besoin en fonds de roulement de leur entreprise, nous avons créé, dans cette édition, un nouveau chapitre consacré à la gestion du BFR. Dans ce domaine très terre à terre, nous avons tenté, dans l'esprit du Vernimmen, de vous donner des éléments conceptuels mais aussi des considérations pratiques. Vous en trouverez un avant-goût dans le thème d’actualité de ce mois qui reprend les 3 premières pages de ce nouveau chapitre.

En anticipation d'un redémarrage du marché des introductions en bourse, en tout cas en Europe car en Asie elles battent leur plein, nous avons créé un autre nouveau chapitre qui leur est intégralement consacré. Espérons que cela ne leur portera pas malchance car beaucoup d'actionnaires, d'entreprises et de banquiers sont dans les starting blocks !

Naturellement, nous avons fait notre travail habituel de mise à jour pour vous offrir un outil de travail au quotidien aussi précis, fiable, exhaustif et pertinent que possible, intégrant :
-  l’ensemble des statistiques et graphiques actualisés présentant les données les plus récentes à juin 2010,
-  les dernières innovations de la pratique financière,
-  les derniers changements de normes comptables,
-  les derniers développements du droit fiscal, boursier et des sociétés,
-  les derniers travaux de recherche, en particulier de Laurent Fresard avec ses études sur l'incidence des disponibilités à l'actif du bilan permettant à l'entreprise de prendre des parts de marché à ses concurrents, comme l'a illustré par exemple L'Oréal lors de la publication la semaine passée de ses résultats semestriels. Et, ceci, indépendamment des préoccupations de liquidité de l'entreprise qui ont pris naturellement une importance cruciale depuis 2008.

Comme tout grand classique, le Vernimmen offre à ses lecteurs des socles de savoir forgés par la pratique et enrichis par des réflexions conceptuelles, lesquelles ne les laissent jamais désarmés face à un problème ou une situation financière :
- le plan type d'une analyse financière, et maintenant d’analyse boursière
- les outils de mesure de la création de valeur,
- les techniques de placements des actions, des obligations, des  crédits syndiqués,
-etc….

Pour vous aider à mieux utiliser «votre Vernimmen», chaque chapitre se clôt par un résumé, des exercices (165 en tout) et des questions (755) corrigés.

Nous avons utilisé le rabat de couverture pour présenter dans un lexique français-anglais-américain les principaux termes de la finance, ainsi qu'une antisèche («Le Vernimmen» résumé en une page !).

Afin de vous aider à aller au-delà, si besoin, chaque chapitre est doté d'une bibliographie avec des conseils d'orientation tant vers des papiers de recherche fondamentale, que vers des articles de presse ou des livres.

Tant en annexe que dans le corps du texte, de très nombreux graphiques et tableaux (plus de 100) vous donnent des éléments de référence et de comparaison.

Enfin, l'index comprend plus de 1 500 entrées.

Voici ce que certains de ses utilisateurs ont écrit sur le Vernimmen 2011 :

«Le Vernimmen m'accompagne depuis le début de ma carrière, et donc depuis la 1ère édition. Comme les grands crus, il s'est enrichi et bonifié avec les années. Il s'est internationalisé et le travail des disciples est vraiment à la hauteur de l'intelligence et du talent du maître, malheureusement trop tôt disparu. Le Vernimmen, en français comme en anglais, reste et restera, avec l'ensemble de ses produits associés (le site,
la lettre,...) la référence pour quiconque ayant à s'intéresser, d'une façon ou d'une autre, à la Gestion Financière d'entreprise». 
Marc Bertonèche, Professeur des Universités, Université Montesquieu Bordeaux IV  Professeur Affilié HEC, Associate Fellow Saïd Business School, University of Oxford, Visiting Professor, Harvard Business School
«La référence pour s’approprier la discipline: l’édition annuelle du
Vernimmen. La finance d'entreprise: une passion qui, ensuite, ne vous quitte plus…»

Benjamin Graisely, étudiant à l’ EDHEC
«Aucune décision financière ne peut se prendre sans placer le business opérationnel au premier plan. Pour accompagner l'analyse de chaque situation, le Vernimmen apporte au financier d'entreprise le recul et le dosage technique pour appréhender correctement la question financière. Un ouvrage indispensable sur l'étagère de mes collaborateurs.» 

Jérôme Lefébure, Membre du directoire et directeur financier de M6
« Ce livre est simplement génial : pour vous expliquer la logique de fonctionnement de tous les aspects de la finance d’entreprise, il fait constamment le lien entre les théories et les pratiques. Pour être à jour, Pascal Quiry et Yann Le Fur ont dû accélérer son rythme de publication et vous donnent vraiment envie de consulter la dernière édition pour être sûr de ne pas rater une marche...»

Robert de Metz, ancien membre du directoire de Paribas, administrateur de Dexia
«Le Vernimmen, c’est comme un vieil ami un peu austère qu’on prend plaisir à retrouver édition après édition, un vieil ami qui nous rappelle que la finance d’entreprises est une matière exigeante, sans doute, mais surtout une matière vivante.»

Agnès Pannier, directrice des finances et de la stratégie du portefeuille, Fonds Stratégique d’Investissement
«Combien de fois le Vernimmen constitue un véritable professeur particulier de finance à domicile !»

Anne-Dauphine Trapet, étudiante à l’ESDES
Pour vous procurer le Vernimmen 2011, cliquez ici.

Naturellement les abonnés à la version électronique en ligne du Vernimmen (www.vernimmenenligne.fr) disposent de la nouvelle édition 2011 depuis quelques jours.
Si vous souhaitez les rejoindre, cliquez ici.

Au-delà de l’aspect pratique (les 2,2 kg de l’ouvrage papier sont parfois lourds surtout quand il faut le transporter...), l’édition électronique offre des possibilités de recherche que l’ouvrage papier ne permet pas, ainsi
qu’une actualisation en temps réel, d'autant plus utile que nous ne publierons pas une édition papier tous les mois et que les changements en finance n'interviennent pas tous au 30 juin !

De surcroît, au-delà des 12 derniers numéros, nous réservons l'exclusivité des archives de La Lettre Vernimmen.net, aux abonnés du Vernimmen en ligne. Par ailleurs, ces mêmes abonnés bénéficient des podcasts de nos cours à HEC Paris.

Enfin, nous avons le plaisir de vous annoncer que le Vernimmen dans sa nouvelle édition 2011 est disponible sous iPad.

Si vous disposez de cet outil et souhaitez y intégrer le Vernimmen 2011, cliquez ici.


Actualités : La gestion du besoin en fonds de roulement

« L’INSEE estimait, en 2009, que le bilan cumulé des entreprises françaises, hors secteur financier et agricole, faisait apparaître des encours clients de 627 Md€, des encours fournisseurs pour 534 Md€ et des stocks pour 364 Md€, soit 457 Md€ de besoins en fonds de roulement d’exploitation. Pour mettre en perspective ces chiffres, on peut les comparer au montant des immobilisations (3 521 Md€ en net) ou du montant des dettes bancaires et financières nettes, soit 1 196 Md€ dont 163 Md€ sous forme de crédits de trésorerie (découverts, facilités de caisse ou de crédits de campagne). On constate que les crédits clients (et symétriquement les crédits fournisseurs), qui sont des crédits commerciaux entre entreprises, représentent plus de trois fois les crédits bancaires de trésorerie.

Le rapprochement du montant du BFR avec celui de l’endettement net n’est pas tout à fait innocent car souvent ces deux postes varient de concert : une hausse du BFR se traduit par une hausse de l’endettement net comme bon nombre d’entreprises l’ont vérifié fin 2008 ; une baisse du BFR se traduit souvent par une baisse de l’endettement net comme bon nombre d’entreprises l’ont démontré en 2009.

Cela dit, la gestion du BFR ne consiste pas à le réduire à tout prix de façon simpliste car il participe aussi de l’équilibre global de l’entreprise. Ceci est trop souvent oublié.

Enfin, les problématiques et les montants du BFR ne sont pas les mêmes selon les secteurs : entre l’industrie (gestion des encours de production, limite de crédits sur les grands clients…) et les services aux particuliers, il y a tout un monde.

Section 1  Quelques réflexions de bon sens

Le besoin en fonds de roulement est un investissement comme un autre, même s’il est parfois pour partie moins choisi qu’un autre (par exemple quand un client « oublie » de payer dans les temps et fait de son fournisseur son banquier à son corps défendant). En tant qu’investissement il doit être géré lucidement et correctement. Le réduire afin de comprimer les besoins de fonds de l’entreprise et d’améliorer sa rentabilité est une possibilité, mais ce n’est pas la seule.

Du point de vue de l’entreprise, qu’est-ce qu’un besoin en fonds de roulement ?

▪ c’est d’abord un élément de conquête commerciale. Il n’y a pas besoin d’avoir vu le film La vérité si je mens 2 pour savoir que les délais de paiement sont un élément des termes d’une transaction commerciale. Allez essayer de percer commercialement en Grèce où les délais de paiements contractuels sont de 73 jours et dans la réalité de 107 jours avec les retards moyens, en demandant d’être payé à 30 jours comme en Scandinavie ! De la même façon, avoir plus de stocks, c’est réduire le risque de perdre une commande faute d’approvisionnements disponibles. Rappelez-vous votre frustration de client au printemps 2009 face aux rayons vides de certains distributeurs ;

▪ c’est ensuite une source de financement quand on le réduit et une source de besoin de financement quand on l’accroît. On pourrait penser que l’enjeu n’est pas le même quand les taux d’intérêt à très court terme sont à 0,4 % par an comme au printemps de 2010 ou à 10 % par an comme entre 1990 et 1993. Faux. Le problème n’est pas tant le coût de l’argent que d’avoir de l’argent en réduisant le BFR afin d’investir, de rembourser des dettes ou de se constituer un trésor de guerre ; ou de ne pas avoir d’argent et d’en avoir besoin. Autrement dit, la gestion du BFR est un problème intemporel même si certaines conjonctures se prêtent mieux que d’autres à sa prise de conscience ;

▪ c’est enfin une source de risques. Risque que le client paie avec retard, paie partiellement ou pas du tout car il a fait faillite, ce qui peut mettre à son tour l’entreprise en difficulté et créer des faillites en chaîne qui se propagent dans l’économie comme des dominos qui tombent. C’est bien pour éviter ce risque que les pouvoirs publics ont pris des dispositions légales pour réduire à 45 jours fin de mois ou 60 jours après l’émission de la facture le règlement de l’acheteur (loi LME en France). C’est aussi un risque de perte de valeur pour obsolescence de certains stocks (livres d’actualité, fleurs coupées, yaourts…).

De façon plus conjoncturelle, le BFR peut être :

▪ un outil pour aider des clients ou des fournisseurs qui auraient des difficultés du fait d’une crise de liquidité. Ainsi fin 2008-début 2009, Peugeot et Renault, soutenus en trésorerie par l’État, ont aidé à leur tour leurs principaux sous-traitants confrontés à une liquidé qui disparaissait, en raccourcissant leurs délais de paiements. Il ne s’agissait pas d’altruisme mais de l’intérêt bien compris de Peugeot et de Renault pour éviter à leurs fournisseurs de faire faillite, ce qui aurait menacé la pérennité de leurs approvisionnements ;

▪ une source de création de valeur en période de taux d’intérêt réels négatifs, pour les secteurs où les stocks sont importants, par le biais des profits d’inflation. Autrement dit, la bonne gestion consiste alors à ne pas les gérer !

▪ une source de spéculation (et donc de risque) lorsque l’entreprise surstocke des matières premières dont elle anticipe que le prix va flamber dans les mois qui viennent.
Le BFR est une résultante de la stratégie de l’entreprise. Quand celle-ci, par exemple, décide de s’intégrer vers l’amont pour sécuriser ses approvisionnements (Arcelor Mittal détient des mines de fer qui lui assurent 45 % de sa consommation), ou vers l’aval pour faire face à une distribution défaillante ou pas encore implantée (SEB possède plus de 1 000 magasins dans 41 pays émergents : Chine, Turquie…), le BFR est nécessairement impacté à la hausse. De la même façon, lorsque l’entreprise décide à l’instar de Bic de sous-traiter une partie de sa production en Asie du Sud-Est et en Chine, les marges progressent (ou évitent de baisser), mais le BFR augmente car les sous-traitants asiatiques n’ont pas la structure financière nécessaire pour accorder des délais de paiements… à la grecque (1) !

Le niveau de besoin en fonds de roulement est aussi le résultat d’un arbitrage financier entre des marges et des coûts. Nous connaissons un groupe de presse magazine qui paie comptant ses fournisseurs de papier. En contrepartie, il achète son papier à un prix imbattable car il est dans une très bonne position pour négocier un rabais sur le prix, supérieur au taux d’un placement de trésorerie, face à des fournisseurs aux besoins de cash quasi inextinguibles compte tenu de la lourdeur de leurs investissements. Le BFR de notre éditeur est médiocre (quasiment pas de crédit fournisseur), sa marge est excellente !

Autre exemple, le secteur du BTP qui s’est structuré autour d’avances clients qui couvrent grosso modo les travaux en cours, et plus pour les meilleurs d’entre eux. Le BFR est faible, mais les marges aussi. On ne peut pas tout demander à son client !

Autrement dit, on peut acheter du cash.

L’entreprise fait des rabais pour que ses clients la paient rapidement : le BFR est alors très bon, la trésorerie plutôt ample mais les marges vont se dégrader. Ainsi aux États-Unis, il est standard de proposer à son client, soit de payer à 30 jours, soit de payer à 10 jours auquel cas il bénéficie d’un escompte de 2 %. Comme le taux actuariel de cette proposition commerciale est de 44,6 %, peu d’acheteurs résistent à la tentation ! (Celui qui résiste signale une bien piètre situation financière qui met la puce à l’oreille de son fournisseur…). Les soldes, quand elles sont exceptionnelles, sont aussi une certaine façon d’acheter du cash.

Le curseur sera souvent fonction de la situation. En période de crise, on privilégiera le cash et donc une gestion stricte du besoin en fonds de roulement. En période faste, on privilégiera la croissance des ventes, les marges au détriment du BFR.

Il y a 4 façons d’approcher la gestion du besoin en fonds de roulement : »

 Pour lire la suite, voir le chapitre 53 du Vernimmen 2011.
(1) Sans compter que les achats ne se font que par containers complets et que l’on achète plus pour éviter les ruptures de stocks (plus d’un mois de délais d’acheminement).


Tableau : Les retards de paiement en Europe

Dans sa dernière livraison trimestrielle, Altares établit que les retards de paiement en Europe s’améliorent mais restent encore à des niveaux élevés, à plus de 14 jours. La palme de la vertu revient à l’Allemagne où 56% des entreprises paient sans retard contre 40% en Europe et seulement 34% en France. A l’autre extrême, se situe l’Espagne où 8% des entreprises ont plus de 120 jours de retard (sic), en plus de délais de paiement moyens de 100 jours (voir la page 264 du Vernimmen 2011).

 



Recherche : Pourquoi les émetteurs américains ne demandent-ils pas le taux de commission payé par les européens pour leurs introductions en bourse ?

Il y a dix ans, un article publié dans le Journal of Finance montrait que les commissions prélevées par les banques américaines lors des introductions en bourse (Initial Public Offerings, ou IPOs) s’élevaient presque toujours à 7% (1), suggérant un marché peu concurrentiel. Nous présentons ce mois-ci un article (2) qui montre que les 7% sont encore plus pratiqués sur la période 1998-2007 aux Etats-Unis, alors que le taux moyen pour les IPOs européennes est de 4%. Selon les auteurs de l’article, rien d’autre qu’un manque de concurrence ne saurait justifier un tel écart.

L’intérêt de l’article vient de la comparaison qu’il présente entre les IPOs américaines et européennes. Il y a dix ans, une telle comparaison aurait été peu significative : les procédures utilisées pour les IPOs n’étaient pas les mêmes, et les marchés n’étaient pas aussi intégrés qu’aujourd’hui. Sur la période considérée (1998-2007), la procédure du bookbuilding (3) s’est imposée des deux cotés de l’Atlantique, et les banques qui pilotent la procédure (bookrunners) sont bien souvent les mêmes (Goldman Sachs, Morgan Stanley et Merrill Lynch sont leaders aux Etats-Unis comme en Europe). En revanche, le marché est plus concentré aux Etats-Unis : les trois leaders totalisent près de la moitié des opérations, contre 30% en Europe.

Dans un premier temps, les auteurs montrent que l’écart de 3 points de pourcentage entre les commissions des IPOs américaines et européennes reste présent lorsque l’on compare des opérations équivalentes (taille, secteur, composition du syndicat bancaire, année). En particulier, les mêmes banques facturent des commissions plus élevées aux Etats-Unis qu’en Europe : on ne peut donc pas attribuer cet écart à des caractéristiques différentes des banques. C’est pour les « petites » introductions (25 à 100 millions de dollars) que l’écart est le plus notable : plus de 95% des IPOs de cette taille aux Etats-Unis donnent lieu à une commission d’exactement 7%. En Europe, 1% seulement des opérations atteignent ce chiffre, et la moyenne est de 4%. Les opérations de plus grande ampleur bénéficient d’économie d’échelle, mais la différence entre Etats-Unis et Europe persiste.

L’article présente ensuite une liste de justifications possibles, les rejetant l’une après l’autre :

• Les coûts indirects pourraient être plus importants en Europe, ce qui rendrait le coût total équivalent. Le principal coût indirect lors d’une IPO est la sous-valorisation du titre introduit. Les auteurs montrent que la sous-valorisation (4) n’est certainement pas plus prononcée en Europe (l’écart, statistiquement non significatif, est favorable à l’Europe).
• Les frais juridiques sont prélevés sur la commission aux Etats-Unis, alors qu’ils sont versés séparément en Europe. Il faut donc les retirer aux Etats-Unis pour une comparaison juste ; l’ajustement ne réduit que faiblement l’écart avec l’Europe (moins d’un demi-point de pourcentage).
• Les banques de détail américaines auraient des coûts fixes plus élevés, ce qui augmenterait le coût de distribution des IPOs. Si cette explication devait être retenue, l’écart devrait disparaître pour les plus grosses opérations, ce qui n’est pas le cas. Le même argument est utilisé pour rejeter l’hypothèse d’un coût de couverture par les analystes plus élevé.
• Le risque juridique serait plus élevé aux Etats-Unis, ce qui justifierait une commission plus élevée. En fait le coût du risque juridique devrait plutôt être inclus dans la sous-valorisation. Aux Etats-Unis, les souscripteurs d’une IPO qui engagent une procédure le font sur la base de l’écart entre le prix payé et le prix auquel ils ont revendu le titre. La sous-valorisation permet donc non seulement de réduire le risque d’une procédure mais aussi l’ampleur des indemnisations réclamées. De plus, les auteurs de l’article montrent qu’une prime de risque juridique incluse dans la commission ne devrait pas dépasser 0,58 %.

Les résultats de cet article fournissent des arguments aux émetteurs américains qui cherchent à négocier des commissions comparables aux niveaux européens.
(1) H.C.CHEN et J.R.RITTER (2000), The seven percent solution, Journal of Finance, vol.55, pages 1105-1131.
(2) M.ABRAHAMSON, T.JENKINSON et H.JONES (2009), Why don’t U.S. issuers demand European fees for IPOs ?, Saïd Business School, University of Oxford.
(3) Pour plus de détails voir le chapitre 31 du Vernimmen 2011
(4) Les auteurs mesurent la sous-valorisation par la surperformance du titre entre le jour de l’introduction et le cinquième jour de cotation.


Q&R : Qu'est-ce que les obligations convertibles conditionnelles ?

Comme nos lecteurs le savent, les obligations convertibles sont des obligations qui peuvent être remboursées, soit en actions de l’émetteur, soit en cash au choix du détenteur de l’obligation convertible (1). On les appelle souvent produits hybrides puisqu’elles partagent les caractéristiques des dettes et des capitaux propres.
Pour un émetteur qui a des difficultés financières, l’obligation convertible sera le plus souvent remboursée en cash et se révèlera donc être in fine une dette car il est peu probable que la valeur de l’action progresse suffisamment pour rendre le remboursement de l’obligation convertible en actions plus intéressant que le remboursement en cash. C’est bien pour cela que nous préconisons de traiter en analyse financière l’obligation convertible comme une dette financière et non comme des capitaux propres.

La seule exception à ce principe général, suivi par la plupart des prêteurs et des agences de notation, est le cas où la valeur de l’action est bien au-delà du prix de remboursement de l’obligation (au moins de 30 %), ce qui fait que la probabilité de conversion en action est très forte. On peut alors traiter l’obligation convertible comme des capitaux propres.

Les banquiers d’affaires ont réussi à placer récemment un produit financier qui compense cet inconvénient de l’obligation convertible, qu’ils avaient conçu il y a bien longtemps sans jamais avoir réussi à trouver simultanément un émetteur et des investisseurs désireux de l’émettre / souscrire. Il s’agit d’une obligations convertible qui se transforme automatiquement (et non au choix de son propriétaire) en capitaux propres
si certains évènements se produisent ou si certains ratios sont franchis par l’émetteur. C’est pour cela que l’on parle d’obligations convertibles conditionnelles (contingent convertible bonds, ou «coco» pour les intimes).
L’utilisation qui en a été faite par les banques Llyods et Rabobank au premier semestre pourrait entraîner d’autres émissions de banques d’ici la fin de l’année. Le comité de Bâle considère ces produits comme faisant partie des capitaux propres réglementaires. En effet, en prévoyant qu’automatiquement ce produit se transforme en capitaux propres si le ratio Tier 1 (2) d’une banque tombe en dessous de 5 %, la solvabilité de l’émetteur est améliorée.
On peut aussi imaginer, toujours basé sur l’idée d’un évènement déclenchant, que la solvabilité de l’émetteur soit améliorée par la suspension du versement de l’intérêt ou le remboursement de la dette par la remise d’actifs spécifiques.
La pierre angulaire de la conception de tels produits est naturellement la définition de l’évènement déclenchant la conversion en capitaux propres. Pour un établissement financier, la référence aux ratios de solvabilité tombe sous le sens. Comme le calcul et la définition de ces ratios peuvent évoluer dans le temps, certains ont pensé que le régulateur bancaire pourrait, de sa propre initiative, déclencher la conversion s’il pense que l’établissement financier est sous capitalisé.

Ces produits sont dans leur enfance et leur développement futur dépendra de l’appétit des investisseurs pour eux. Mais s’ils se développent, ils pourraient être intéressants pour certains émetteurs non financiers souhaitant renforcer leur solvabilité sans émettre de capitaux propres. On se rappelle (3) qu’en 2005 – 2007, on avait vu l’apparition d’obligations super-subordonnées qui avaient montré qu’une demande existait des deux côtés pour ce produit.
(1) Pour plus de détails, voir le chapitre 30 du Vernimmen 2011.
(2) Pour plus de détails, voir la Lettre Vernimmen.net n° 20 de juin 2003. 
(3) Pour plus de détails, voir le chapitre 30 du Vernimmen 2011.


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